samedi 11 octobre 2014

Pays merveilleux ou meilleur des mondes ?



(Encore un article un peu décalé sur Transitio, avec une drôle de fin)

Mise à jour au 14 mars 2024 :

Certains s'étonnent, mi-amusés, de mon goût pour l'idée républicaine. Pour beaucoup, cela fait partie des histoires que l'on raconte aux enfants. Beaucoup en effet, se croyant habiles, réduisent l'Histoire, à des histoires...
C'est ignorer que nous vivons tous au milieu de ce que certains sociologues désignent sous le nom de "réalités imaginaires". La famille, la religion, l'état, la banque... sont des réalités imaginaires. Sans ces concepts inventés par nos ancêtres, que nous feignons tous de croire réels, nous ne pourrions pas faire société.
Alors, oui, les idées de Républiques et de Nation commencent à être usées. Peu à peu nous n'y croyons plus et peu à peu la société se délite.
Ces idées n'étaient pas gravées dans le marbre. Je veux bien que l'on nous propose autre chose pour les remplacer.
Que nous propose-t-on aujourd'hui qui puisse fonctionner aussi bien que les idées de Liberté, Égalité, Fraternité, Laïcité, Universalité ?

Je vous laisse lire cet article écrit il y a 10 ans.


Un bien étrange document

    Un soir du mois dernier, mon fils est revenu de la journée "défense et citoyenneté", avec un bien étrange document. Je ne parle pas de l’utile brevet de secourisme qui lui a été donné à l’issue de la formation qu’il a reçue dans la journée, mais d’une étonnante charte des droits et devoirs du citoyen français.

    Qu’est-ce là donc ? Me suis-je dit, avant de me plonger dans la lecture de cette jolie feuille de papier bordée de bleu blanc rouge.

    Ce que j’ai lu m’a déconcerté. On y parlait d’un pays merveilleux dont le peuple se reconnaissait dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, proclamée à l’occasion d’une révolution et dans les principes démocratiques hérités de son histoire.
    Un pays dont la société forme une république indivisible, laïque, démocratique et sociale ! Une société paradisiaque garantissant à tous la sécurité des personnes et des biens, assurant la liberté de conscience respectant toutes les croyances, accordant à chacun la liberté de croire, de ne pas croire, ou de changer de religion.



Un pays merveilleux

    Dans ce pays de cocagne, tout être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance, possède des droits inaliénables !

    Tous les citoyens y sont égaux devant la loi, sans distinction de sexe, d’origine, de race ou de religion. La loi est la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse !

    L’homme et la femme y ont dans tous les domaines les mêmes droits ! (Non mais vous vous rendez compte ?)

    Dans ce pays étonnant, l’organisation de l’enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l’Etat !

    La Nation y garantit à tous la protection de la santé, la sécurité matérielle et le droit à des congés. Toute personne qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler y a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence !

    Je me demandais de quel pays merveilleux il pouvait s’agir, jusqu’à ce que le terme de nation finisse par me rappeler quelque chose…



La Nation ?

    La Nation ? Ce terme venu des temps anciens qui prit un sens bien particulier au cours du XVIIIe siècle en France pour devenir un mot clé des journées révolutionnaires. Ce mot que clamait le peuple en arme le 21 septembre 1792, lors de la bataille de Valmy
    En ce temps-là, cette Nation était, pour ceux qui y étaient attachés, la communauté des hommes libres et égaux, vivant sous des lois qu’ils s’étaient données par l’intermédiaire de leurs députés. Souveraine, elle était ouverte à tous les hommes. La nationalité venait du "sol" et non du "sang". L’étranger qui vivait, travaillait et acceptait les lois françaises était alors reconnu comme Français. Rien à voir avec le concept puant de nationalisme "Mariné" dans les basses-fosses de ce parti politique fondé par des ennemis jurés de la République et qui s’en est approprié les symboles.
    Non, je ne rêvais pas, ce pays merveilleux, cet incroyable pays de Cocagne dont cette charte étonnante parlait, était celui dans lequel je vis, la France.

    Mais pourtant, tout ce qui y était écrit me semblait si loin de la réalité !

    Ce beau pays qui suscitait autrefois l’admiration pour sa qualité de vie et son esprit de liberté, est en train de s’éteindre peu à peu. La "World Company" et la main invisible du marché auront eu raison de lui. Ses grandes villes grossissent comme des cancers immobiliers, concentrant la pollution et attirant les miséreux du monde entier dans des banlieues perdues et des bidons-villes où croissent le ressentiment et la colère. Ses villages se vident et tombent en ruines, ses campagnes se désertifient si elles ne sont pas transformées en parcs d’attractions pour touristes, et sa terre nourricière se meurt peu à peu, empoisonnée par mille mauvais traitements.




Le meilleur des mondes possibles

    La société (du latin socius : compagnon, associé), la société française se disloque, le contrat social qui liait fraternellement les habitants divers de ce beau pays, ne tiendra plus longtemps. Nous rejoindrons bientôt le troupeau des zombis du meilleur des mondes possibles
    Il y a quelques temps, Andy Street, le patron du groupe anglais John Lewis, déclarait que la France était sclérosée, sans espoir et "finie". Le fameux journal anglais "The Guardian" est venu au secours de la France en comparant le Royaume Uni et la France. Vous pouvez lire en anglais cet élégant sauvetage de nos amis du Guardian : "Is France really finished ?".
    Je pense néanmoins que cet Andy Street n’est pas loin d’avoir raison. Nous vivrons probablement bientôt comme nombre de ses malheureux compatriotes, et lui et ses semblables dans le monde, viendront en villégiatures dans nos châteaux et hôtels de luxe.
  Il semble cependant que nous ne cédions pas assez vite, puisque l’agence de notation Standard & Poor's vient de donner un dernier avertissement à la France !


Manifestation devant le siège de Standard & Poors le 15 janvier 2012 (J'y étais)



Nostalgie républicaine

    Peut-être êtes-vous étonnés par le propos de cet article ? Je ne suis pourtant pas un vieux ronchon réac' sombrant dans le "déclinisme" fort à la mode ces temps-ci. Il s'agit seulement d'une petite crise de nostalgie républicaine. Cette façon républicaine de penser le contrat social me semblait belle et juste.
    Mais je ne suis pas un naïf. En effet, je ne suis même pas certains que ceux qui ont signé le décret approuvant cette charte adhéraient vraiment aux beaux principes qui y sont énoncés.
    N’importe, j’aime lire et relire cette charte des droits et devoirs du citoyen français. Même si elle ressemble à un testament...

    La voici, faites-vous une idée (et n'oubliez pas de regarder en bas de la page !) 



En application de l’article 21-24 du code civil, la présente charte rappelle les principes et valeurs essentiels de la République et énonce les droits et devoirs du citoyen, résultant de la Constitution ou de la loi.

Principes, valeurs et symboles de la République française

Le peuple français se reconnaît dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 et dans les principes démocratiques hérités de son histoire.
  • Il respecte les symboles républicains.
  • L’emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge.
  • L’hymne national est La Marseillaise.
  • La devise de la République est « Liberté, Egalité, Fraternité ».
  • La fête nationale est le 14 juillet.
  • "Marianne" est la représentation symbolique de la République.
  • La langue de la République est le français.

La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale dont les principes sont fixés par la Constitution du 4 octobre 1958.

  • Indivisible : la souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants élus et par la voie du référendum. Aucune partie du peuple, ni aucun individu, ne peut s’en attribuer l’exercice.
  • Laïque : la République assure la liberté de conscience. Elle respecte toutes les croyances. Chacun est libre de croire, de ne pas croire, de changer de religion. La République garantit le libre exercice des cultes mais n’en reconnaît, n’en salarie ni n’en subventionne aucun. L’Etat et les religions sont séparés.
  • Démocratique : le principe de la République est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. Direct ou indirect, le suffrage est toujours universel, égal et secret. La loi étant l’expression de la volonté générale, tout citoyen doit la respecter. Nul ne peut être contraint à faire ce que la loi n’ordonne pas. Rendue au nom du peuple français, la justice est indépendante. La force publique garantit le respect de la loi et des décisions de justice.
  • Sociale : la Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement.
La République garantit à tous la sécurité des personnes et des biens.

La République participe à l’Union européenne constituée d’Etats qui ont choisi librement d’exercer en commun certaines de leurs compétences.

Les droits et les devoirs du citoyen français

Tout être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance, possède des droits inaliénables. Sur le territoire de la République, ces droits sont garantis à chacun et chacun a le devoir de les respecter. A la qualité de citoyen français s’attachent en outre des droits et devoirs particuliers, tels que le droit de participer à l’élection des représentants du peuple et le devoir de concourir à la défense nationale ou de participer aux jurys d’assises.

Liberté
  • Les êtres humains naissent et demeurent libres et égaux en droits.
  • La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui.
  • Le respect dû à la personne interdit toute atteinte à sa dignité. Le corps humain est inviolable.
  • Nul ne peut être inquiété pour ses opinions pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public. Tout citoyen peut parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas prévus par la loi.
  • Chacun a droit au respect de sa vie privée.
  • Nul ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas et dans les formes déterminées par la loi. Chacun est présumé innocent tant qu’il n’a pas été jugé coupable.
  • Chacun a la liberté de créer une association ou de participer à celles de son choix. Il peut adhérer librement aux partis ou groupements politiques et défendre ses droits et ses intérêts par l’action syndicale.
  • Tout citoyen français âgé de dix-huit ans et jouissant de ses droits civiques est électeur. Chaque citoyen ayant la qualité d’électeur peut faire acte de candidature dans les conditions prévues par la loi. Voter est un droit, c’est aussi un devoir civique.
  • Chacun a droit au respect des biens dont il a la propriété.
Egalité

  • Tous les citoyens sont égaux devant la loi, sans distinction de sexe, d’origine, de race ou de religion. La loi est la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse.
  • L’homme et la femme ont dans tous les domaines les mêmes droits.
  • La République favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales.
  • Chacun des conjoints peut librement exercer une profession, percevoir ses revenus et en disposer comme il l’entend après avoir contribué aux charges communes.
  • Les parents exercent en commun l’autorité parentale. Ils pourvoient à l’éducation des enfants et préparent leur avenir.
  • L’instruction est obligatoire pour les enfants des deux sexes jusqu’à seize ans. L’organisation de l’enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l’Etat.
  • Les citoyens français étant égaux, ils peuvent accéder à tout emploi public selon leurs capacités.
Fraternité

Tout citoyen français concourt à la défense et à la cohésion de la Nation.

Une personne qui a acquis la qualité de Français peut être déchue de la nationalité française si elle s’est soustraite à ses obligations de défense, ou si elle s’est livrée à des actes contraires aux intérêts fondamentaux de la France.

Chacun a le devoir de contribuer, selon ses capacités financières, aux dépenses de la Nation par le paiement d’impôts et de cotisations sociales.

La Nation garantit à tous la protection de la santé, la sécurité matérielle et le droit à des congés. Toute personne qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence.


"Marianne" est la représentation symbolique de la République

Cliquez sur l'image ci-dessous et sur le site de l'Assemblée nationale, vous pourrez voir ces nouvelles Mariannes qui font honneur à la France, telle que je l'aime.



Voici l'une d'entre-elles


Je suis bien d'accord avec toi, citoyenne Safia.

    Je crains hélas, qu'une campagne telle que celle-ci, réalisée en 2003 par l'Assemblée nationale, ne serait plus possible à présent. Car le lien social qui relie les citoyens de notre pays n'a jamais été aussi ténu.


Bon,... je le reconnais, cet article est quelque peu... pessimiste. 😢

    Voici selon moi, le nouveau contrat social qui nous est imposé par Standard & Poors et consorts...
"Le plus haut niveau de vie"
"Il n'y a pas d'autre chemin que le chemin de vie américain"



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